FAITS

Par un acte en date du 2 juin 2008 une banque accorde à M et Mme co-emprunteurs solidaires, deux prêts destinés à l’achat par M. pharmacien de parts sociales d’une société exploitant une officine de pharmacie.

Impayés et assignation par la banque des co-emprunteurs et Mme conteste la validité de son engagement et oppose à titre subsidiaire à la banque un manquement à son obligation de mise en garde. La cour d’appel de Douai le 20 décembre 2018 déboute la demande d’annulation et de mise en garde.

POSITION DE LA COUR DE CASSATION

« Ayant retenu que la cause de l'obligation des co-emprunteurs de rembourser les emprunts contractés résidait dans la remise par la banque des fonds prêtés, laquelle avait eu lieu, et que l'objet du prêt était de permettre au conjoint de Mme D... d'acquérir les parts de la société Olivez-Régent, sans qu'elle-même en fût associée, la cour d'appel a, effectuant ainsi la recherche invoquée par le moyen, légalement justifié sa décision.»

MISE EN PERSPECTIVE DE LA DECISION

Cette figure juridique nous en rappelle une autre consanguine que les banques rencontrent assez fréquemment, qui est celle du statut du co-emprunteur solidaire d’un bien acquis en indivision ou certains co-emprunteurs reprochent aux banques la partie « non causée » de leur emprunt correspondant à la part indivise de l’autre acquéreur.

La haute Cour nous dit que la cause de l’obligation des co-emprunteurs est le remboursement des emprunts. Dont acte.

Nous savons que contrat de prêt consenti par un professionnel est un contrat consensuel – Cassation civile 1. 28 mars 2000 – 97-21422 – « Mais attendu que le prêt consenti par un professionnel du crédit n’est pas un contrat réel ».

Cause et objet sont ici clairement distingués. L’objet du prêt étant l’acquisition par les deux co emprunteurs des parts de l’officine de pharmacie étant admis qu’une banque ne peut financer une telle acquisition qu’à une personne ayant le diplôme requis pour exercer la profession de pharmacien.

L’obligation des emprunteurs trouve sa cause dans la remise des fonds par la banque.

Sur le second point la réponse de la cour de cassation nous surprend quelque peu quand elle juge «  En statuant ainsi, alors que l'action en responsabilité contre la banque pour manquement à son devoir de mise en garde, qu'elle soit formée par voie de demande reconventionnelle ou de défense au fond, se prescrit à compter de la réalisation du dommage ou de la date à laquelle il est révélé à la victime, la cour d'appel a violé le texte susvisé. » Nous savons pourtant que la prescription n’a pas prise sur la défense au fond !

Loïc Belleil, directeur de la recherche juridique de Case Law Analytics

Source : Cass. Com. 8 avril 2021, pourvoi n°19-12693, L’essentiel du droit bancaire n°6, Juin 2021 page 4.

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