FAITS

Une association souscrit un contrat de fourniture avec une société qui s’engage à lui livrer un photocopieur et un ordinateur. L’association conclut un contrat de maintenance avec une autre société concernant ces matériels et concernant le photocopieur un contrat de location financière avec une société de financement sur 63 loyers mensuels constants de 330 €.

L’association conclut par la suite un second contrat puis un troisième contrat dans les mêmes conditions mais avec un autre partenaire financier.

Invoquant différents manquements l’association assigne les sociétés cocontractantes devant le TGI ainsi que les sociétés de financement en annulation et résolution des contrats de maintenance et subsidiairement en annulation et résolution des contrats de location financière.

La cour d’appel d’Aix en Provence le 12 février 2019 juge les contrats interdépendants sans que la preuve soit rapportée d’une organisation préalable d’une collaboration entre le représentant de la société prestataire de services et le bailleur financier et c’était là l’angle d’attaque du pourvoi.

POSITION DE LA COUR DE CASSATION

« Il résulte de l'article 1134 du code civil, dans sa rédaction antérieure à celle issue de l'ordonnance du 10 février 2016, que sont interdépendants les contrats concomitants ou successifs qui s'inscrivent dans une opération incluant une location financière, sans que soient exigées, en outre, l'organisation préalable d'une collaboration entre le représentant de la société prestataire de services et le bailleur financier ou, à tous le moins, la nécessaire information de celui-ci sur les modalités et la finalité de l'opération envisagée dans sa globalité, ainsi que sa volonté de consentir au financement en considération des engagements pris par le fournisseur envers le locataire.

Il résulte de l'article 1134 du code civil, dans sa rédaction antérieure à celle issue de l'ordonnance du 10 février 2016, que sont interdépendants les contrats concomitants ou successifs et qui s'inscrivent dans une opération incluant une location financière.


En premier lieu, les contrats en cause ayant été conclus antérieurement à l'entrée en vigueur de l'ordonnance du 10 février 2016, fixée au 1er octobre 2016, la cour d'appel n'était pas tenue de procéder aux recherches inopérantes invoquées par les première et deuxième branches du moyen.


En second lieu, l'arrêt relève que, dans le bon de commande établi le 23 octobre 2013 entre la société VSD et l'association, la première s'est engagée, envers la seconde, non seulement à fournir le matériel objet du contrat de location financière conclu le 17 novembre 2013 entre l'association et la société GE, qui fixait le loyer mensuel à 330 euros pendant soixante-trois mois, mais également à payer une contribution financière sous la forme de versements mensuels de 378 euros pendant vingt-quatre mois renouvelable et d'un versement annuel de 1 000 euros pendant deux ans. Par ces constatations, qui font ressortir que le contrat de location financière était destiné à financer le matériel objet du contrat de fourniture/sponsoring et que le coût des loyers incombant au locataire devait être compensé en partie par l'engagement financier pris par le fournisseur dans le cadre de ce même contrat de fourniture/sponsoring, la cour d'appel a caractérisé une situation d'interdépendance entre ces deux contrats. »

MISE EN PERSPECTIVE DE LA DECISION

La question de l’interdépendance contractuelle revient dans le débat après la réforme du code civil.

La chambre mixte du 17 Mai 2013 – 11-22768 – a fixé la jurisprudence en cette matière en jugeant : « Mais attendu que les contrats concomitants ou successifs qui s’inscrivent dans une opération incluant une location financière, sont interdépendants ; que sont réputées non écrites les clauses des contrats inconciliables avec cette interdépendance…… ». La jurisprudence des autres chambres s’est appropriée cette position : Cassation commerciale 12 juillet 2017 – 15-27703 et 15-23552 – et cassation commerciale 4 juillet 2018 – 17-15597 – qui nous dit que point n’est besoin que la caducité soit prononcée par le même jugement.

L’article 1186 du nouveau code civil sur l’interdépendance contractuelle et la caducité dispose en son dernier alinéa «  La caducité n’intervient toutefois que si le contrat contre lequel elle est invoquée connaissait l’existence de l’opération d’ensemble lorsqu’il a donné son consentement ».

La question était de savoir si la Cour qui était saisie sur le fondement de l’ancien article 1134 du code civil allait profiter de l’occasion pour aligner sa jurisprudence sur ce dernier alinéa précité.

Elle n’en fait rien et confirme sa démarche objective la cour d’appel ayant bien pris soin de caractériser l’interdépendance contractuelle.

Loïc Belleil, directeur de la recherche juridique chez Case Law Analytics

Source : Cass. Com. 17 février 2021, pourvoi n°19-19421, L'essentiel du droit bancaire n°4, Avril 2021, page 7.