FAITS

Le CIC Sud Ouest consent un prêt à des acquéreurs, garanti par la société Crédit Logement et ce pour l’acquisition d’un bien en état futur d’achèvement vendu par une société qui bénéficie de la garantie d’achèvement de la Compagnie Européenne de garanties et cautions.

Les délais n’étant pas respectés les acquéreurs ont assigné vendeur, banque, et garant en résolution de la vente et du contrat de prêt.

Le vendeur est placé en redressement puis en liquidation judiciaire et le mandataire intervient à l’instance.

Le premier juge et à sa suite la cour d’appel de Pau le 12 Mars 2019 prononcent la résolution de la vente et du prêt et condamnent les acquéreurs solidairement à payer à la banque la somme de 116 330,05 €.

Les acquéreurs se pourvoient en cassation au motif essentiel que la banque ayant été désintéressée par la caution n’a plus qualité pour agir.

POSITION DE LA COUR DE CASSATION

« Vu l'article 2306 du code civil et l'article 122 du code de procédure civile :
Selon le second de ces textes, constitue une fin de non-recevoir tout moyen qui tend à faire déclarer l'adversaire irrecevable en sa demande, sans examen au fond, pour défaut de droit d'agir, tel le défaut de qualité, le défaut d'intérêt, la prescription, le délai préfix, la chose jugée. Selon le premier, la caution qui a payé la dette est subrogée à tous les droits qu'avait le créancier contre le débiteur.
Il s'en déduit que la caution, qui a payé la banque, est subrogée à tous ses droits et que celle-ci n'a plus intérêt à solliciter de l'emprunteur la restitution du capital prêté par suite de la résolution du prêt affecté, en conséquence de celle du contrat de vente.
Pour rejeter la fin de non-recevoir soulevée par les emprunteurs et condamner ceux-ci à payer à la banque la somme de 116 083,05 euros, l'arrêt retient que la résolution du contrat de crédit consécutive à la résolution de la vente emporte l'obligation pour les emprunteurs de rembourser à la banque le capital emprunté et relève que celle-ci justifie avoir versé cette somme auprès du vendeur à la suite des appels de fonds intervenus entre les 8 février 2011 et 29 mars 2012.
En statuant ainsi, après avoir constaté que la caution avait, selon quittance du 20 juillet 2015, payé à la banque la somme de 141 180,45 euros, la cour d'appel, qui n'a pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations, a violé les textes susvisés.»

MISE EN PERSPECTIVE DE LA DECISION

L’affaire n’est pas banale.

La cour d’appel avait ainsi motivé sa position : « En conséquence, et nonobstant le remboursement effectué par la société crédit logement pour le compte de M. et Mme L. à la société CIC sud-ouest de la somme de 141 180,45 € tels que cela résulte de la quittance du 20 juillet 2015, à raison des échéances impayées à compter du 15 août 2013 et jusqu'au 15 décembre 2014, outre les pénalités de retard, M. Todd L. et Mme Corinne D. par suite de la résolution de la vente, seront condamnés à payer à la société CIC sud-ouest la somme de 116 083,55 € outre intérêts au taux légal pour chaque règlement intervenu à compter de sa date jusqu'à parfait règlement étant rappelé, que la société CIC même tenue de rembourser à M. et Mme L. les échéances de remboursement du crédit postérieures au mois de mars 2013 dont ils justifieront le paiement. »

C’est donc bien après voir mentionné le remboursement effectué par la caution que la cour d’appel condamne néanmoins les emprunteurs à rembourser à la banque le montant mis à disposition.

Pour la cour de cassation la caution qui a payé est subrogée dans tous les droits du créancier qui n’a donc plus qualité pour agir, d’ou le visa à l’article 122 du CPC.

Sur cette question voir également : Cassation commerciale 27 Mars 2007 – 05-20757 –

Le paiement doit bien sûr être intégral dans la mesure ou les banques insèrent dans leur contrat de cautionnement la règle selon laquelle la subrogation ne peut nuire au subrogeant si le paiement n’est pas intégral. Dans notre espèce c’était le cas. Seules les conséquences de la résolution venaient perturber la réflexion.

Loïc Belleil, directeur de la recherche juridique de Case Law Analytics.

Source : Première Chambre Civil, 9 mars 2022, pourvoi n°19-19392, Publié au bulletin. L'essentiel du droit bancaire, n°5, mai 2022, page 1.