FAITS

Ils sont relativement classiques. Une banque. Un crédit. Une caution. Une procédure collective. Une assignation et la caution invoque la nullité de son engagement ainsi que sa disproportion. La cour d’appel de DOUAI le 19 novembre 2020 déboute la caution qui se pourvoit en cassation.
Ses arguments sont au nombre de deux: la nullité pour avoir recueilli la caution du dirigeant après la mise en place du crédit et sous la menace de la cessation immédiate du crédit et la disproportion pour ne pas avoir vérifié les informations figurant sur la fiche d’information.

POSITION DE LA COUR DE CASSATION

Sur la disproportion

« Après avoir relevé que M. [S] a certifié l'exactitude des renseignements mentionnés dans la fiche patrimoniale, l'arrêt retient que, même en faisant abstraction des sommes indiquées au titre des participations détenues par ce dernier dans le capital des sociétés VDL et Lille vacances, de celles inscrites en compte courant d'associé dans les livres de ces sociétés et de leurs bénéfices, l'engagement litigieux, souscrit à hauteur de 360 000 euros, ne présente aucun caractère excessif au regard des valeurs déclarées au titre du bien immobilier, du contrat d'assurance-vie, du portefeuille boursier et des dépôts sur différents comptes bancaires, d'un montant total de 980 000 euros.
En l'état de ces constatations et appréciations souveraines, faisant ressortir que ceux des éléments figurant dans la fiche de renseignement qui n'étaient affectés d'aucune anomalie apparente permettaient de considérer que l'engagement souscrit n'était pas disproportionné aux biens et revenus de la caution, la cour d'appel a, à bon droit, jugé que la banque n'était dès lors pas tenue de vérifier l'exactitude des sommes mentionnées dans ladite fiche,
correspondant, aux titres de participation dans le capital des sociétés VDL et Lille vacances, au compte courant d'associé dans les livres de ces sociétés et à leurs bénéfices.
Le moyen n'est donc pas fondé.»

MISE EN PERSPECTIVE DE LA DECISION


Très intéressante décision rendue par la cour régulatrice en la matière de la disproportion et des obligations de la banque qui recueille un engagement de caution.
Les informations figurant sur la fiche bien connue en la matière étaient suffisantes pour dire que l’engagement de caution n’était pas manifestement disproportionné sans que la banque ait à vérifier la valeur des participations de la caution dans différentes sociétés, sous-entendu que lesdites participations pouvaient être déficitaires dans la mesure ou l’une des sociétés avait un endettement colossal.
La cour d’appel s’était contentée d’apprécier le patrimoine de la caution sur la base des valeurs déclarées sur la fiche, valeurs qui permettaient de considérer que le patrimoine de la caution était suffisant pour honorer sa signature.
La cour d’appel et à sa suite la cour régulatrice jugent que dès lors que la caution certifie l’exactitude des informations mentionnées la banque n’a pas à pousser plus avant ses investigations.
Encore une fois le déclaratif est salvateur, pour autant qu’il ne soit pas anormal. En ce sens voir Cassation civile1. 12 novembre 2015 – 14-21725 – Cassation commerciale 14 décembre 2010 – 09-69807- 22 septembre 2016 – 15-18403- les cours d’appel adhèrent à cette jurisprudence CA Bordeaux 21 Juin 2018 RG 17/01804.
En ce qui concerne la nullité la cour d’appel et la cour de cassation n’y font pas droit.

Loïc Belleil, directeur de la recherche juridique de Case Law Analytics.

Source: Cass. Chambre Commerciale, 21 septembre 2022. Pourvoi n°21-12218. Publié au bulletin. LEDB N° 10 NOVEMBRE 2022 PAGE 7.