FAITS

Une banque consent deux crédits à une société de pompes funèbres garantis par la caution vraisemblablement du dirigeant. Liquidation judiciaire de la société et la banque obtient la condamnation de la caution par un jugement du tribunal de commerce en date du 29 novembre 2012 confirmé par un arrêt en date du 27 novembre 2014.

Par la suite la caution poursuit  la banque devant le tribunal judiciaire pour mettre en jeu sa responsabilité pour non-respect du devoir de mise en garde. En première instance et en appel la caution est déboutée par application de la concentration des moyens. Elle se pourvoit en cassation au motif qu’elle était soumise à la concentration des moyens et non des demandes.

POSITION DE LA COUR DE CASSATION

« Ayant relevé que, poursuivi en exécution de son engagement de caution, M. [G] avait seulement demandé des délais de paiement qui lui avaient été accordés par jugement du tribunal de commerce de Soissons du 29 janvier 2012 et n'avait invoqué la responsabilité civile de la banque et demandé sa condamnation à lui verser des dommages-intérêts venant en compensation des condamnations prononcées à son encontre qu'à titre subsidiaire devant la cour d'appel, laquelle avait déclaré sa demande irrecevable comme nouvelle en appel et confirmé le jugement, la cour d'appel en a exactement déduit que la demande dont elle était saisie, qui tendait à remettre en cause, par un moyen nouveau, la condamnation irrévocable de M. [G] au paiement des sommes dues au titre de ses engagements de caution et se heurtait à l'autorité de chose jugée attachée au jugement du tribunal de commerce de Soissons confirmé par la cour d'appel d'Amiens, était irrecevable. »

MISE EN PERSPECTIVE DE LA DECISION

Cet arrêt fait l’objet d’une publication au bulletin. La concentration des moyens refait surface régulièrement. Elle est fille de l’autorité de la chose jugée.

L’assemblée plénière en date du 7 juillet 2006 – 04-10672 avait jugé en ces termes: «  Qu’il incombe au demandeur de présenter dès l’instance relative à la première demande l’ensemble des moyens qu’il estime de nature à fonder celle-ci ». Il n’était donc question que de moyens. La deuxième chambre a pu jeter le doute avec son arrêt en date du 1 février 2018 – 17-10849 où elle semblait mélanger moyens et demandes alors que de son côté la première chambre semble limiter l’application de la concentration aux seuls moyens: Cassation civile 1. 12 Mai 2016 – 15-16743.

De son côté la chambre commerciale applique cette concentration sans état d’âme : Cassation commerciale 22 Mars 2016 – 14-23167. Elle peut jouer au détriment de la banque : Cassation civile 2. 6 Juin 2019 – 18-16650. Les arrêts rendus par la deuxième chambre en date du 27 Février 2020 – 18-23972 et 18-23370 – et qui font l’objet d’une forte publicité n’ont pas apporté de grands changements dans la mise en application de cette concentration. Pour l’application devant le JEX : voir Cassation commerciale 9 Mai 2018 – 17-14568.

Moyens ou demandes la question reste entière.

Loïc Belleil, directeur de la recherche juridique chez Case Law Analytics

Source : Cass. Civ. 2ème, 1er juillet 2021, pourvoi n°20-11706, publié au bulletin, L’essentiel du droit bancaire n°8 septembre 2021, p.5

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