FAITS

La société MCS se prévalant d’une créance qui lui avait été cédée par la BNP et qui concernait un sieur D condamné en qualité de caution, a inscrit un nantissement judiciaire provisoire sur des parts détenues par cette caution.

Celle-ci contestant la qualité à agir de la société MCS l’a assignée en mainlevée de ladite mesure conservatoire.

La cour d’appel  de Toulouse a accueilli cette demande le 4 septembre 2019 au motif que la créance se rapportait au débiteur principal et non à la caution.

La société MCS se pourvoit en cassation au motif que la créance transfère au cessionnaire de plein droit les droits et actions appartenant au cédant et attachés à la créance, qui sont des accessoires de ladite créance.

POSITION DE LA COUR DE CASSATION

«Vu l'article 1692 du code civil, dans sa rédaction antérieure à celle issue de l'ordonnance du 10 février 2016 :
Il résulte de ce texte que la cession de créance transfère au cessionnaire les droits et actions appartenant au cédant et attachés à la créance cédée, notamment le titre exécutoire obtenu par le cédant à l'encontre de la caution garantissant le paiement de la créance.
Pour dire la société MCS et associés dépourvue de qualité à agir, l'arrêt retient qu'il résulte des termes de la cession qu'elle concerne la créance détenue par la banque à l'égard de la société CVL et non celle détenue contre M. [D], de sorte que son créancier du chef du jugement du 18 janvier 1994 demeure la banque.
En statuant ainsi, alors que la société MCS et associés, cessionnaire de la créance, était fondée à se prévaloir du titre exécutoire obtenu par la banque contre M. [D], pris en sa qualité de caution, peu important l'absence de mention de la créance détenue sur la caution dans l'acte de cession, la cour d'appel a violé le texte susvisé.»

MISE EN PERSPECTIVE DE LA DECISION

Dans un précédent arrêt (5 février 2008 – 06-17029) la même chambre commerciale avait jugé à l’identique : « Attendu qu'en statuant ainsi, alors que la société MCS, cessionnaire de la créance, était fondée à se prévaloir du titre exécutoire obtenu par la banque à l'encontre de la caution, la cour d'appel a violé le texte susvisé ».

Pourtant l’argument invoqué était un peu plus fin que celui de notre espèce puisque la caution invoquait le titre exécutoire propre qui la concernait et qui aurait exigé une cession particulière.

La créance vis à vis de la caution, dès lors qu’elle fait l’objet d’un titre exécutoire, a t’elle une vie autonome qui justifierait une cession et un transport particuliers ?

Nous savons que la prescription est déterminée par la nature de la créance et que celle-ci ne change pas par la seule présence d’un titre exécutoire : Cassation mixte 26 Mai 2006 – 03-16800 – la question est entière même si l’arrêt du 5 février 2008 y répond.

Notre arrêt est rendu au visa de l’ancien article 1692 du code civil. Le nouvel article 1321 ne modifie pas cette approche.

De même nous ne pensons pas que la réforme des suretés et notamment du droit du cautionnement modifie cette approche.

Loïc Belleil, directeur de la recherche juridique de Case Law Analytics

Source : Cass. Com. 20 octobre 2021, pourvoi n°19-24391, L’essentiel du droit bancaire n°11, décembre 2021, page 7

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