FAITS

Une banque consent un prêt à une société afin de financer la construction d’un immeuble. L’acte prévoyait que la dite société devait verser à la banque l’intégralité du prix de vente des lots et mandat était donné au notaire pour qu’il y procède.

Des versements sont effectués correspondant à deux ventes. La société est mise en liquidation judiciaire et la banque n’ayant pas obtenu le remboursement de son prêt n’a été colloquée que pour une somme de 200 000 € et a assigné le notaire en paiement d’une somme de près de 113 000 € correspondant à la part non perçue sur les ventes des lots 8 et 10.

La cour d’appel de Poitiers par arrêt en date du 12 novembre 2019 déclare l’action de la banque irrecevable comme prescrite.

Pourvoi de la banque au moyen que le dommage ne pouvait se manifester qu’à la vente de tous les lots soit bien après la date fixée par la cour d’appel.

POSITION DE LA COUR DE CASSATION

5. Vu l'article 2224 du code civil :

6. Il résulte de ce texte que la prescription d'une action en responsabilité court à compter de la manifestation du dommage et non de la commission de la faute.

7. Pour juger prescrite l'action engagée le 22 décembre 2015 par le Crédit mutuel, l'arrêt retient qu'il résulte sans ambiguïté de la lettre du 15 décembre 2010 que seule une partie du prix de vente a été remise au Crédit mutuel qui aurait dû, en exécution des stipulations contractuelles, être destinataire de la totalité du prix de vente et était, dès cet instant, en mesure d'appréhender le manquement du notaire et qu'il ne pouvait être soutenu que la certitude du préjudice lié au défaut de perception de l'intégralité du prix de vente dépendait des ventes ultérieures des autres lots.

8. En statuant ainsi, la cour d'appel, qui a fixé le point de départ de la prescription à la date du manquement du notaire à ses obligations et non à celle de la manifestation du dommage, qui consistait dans l'impossibilité pour la banque de recouvrer sa créance et ne pouvait être caractérisé à cette date dès lors que cinq lots restaient à vendre, a violé le texte susvisé.

MISE EN PERSPECTIVE DE LA DECISION

Rien de nouveau bien au contraire. Le point de départ de l‘action en responsabilité court du jour de la manifestation du dommage et non pas de la faute.

Loïc Belleil, directeur de la recherche juridique chez Case Law Analytics

Source : Cass. Civ. 3ème, 28 janvier 2021, pourvoi n°19-26044, L'essentiel du droit bancaire n°3 page 5.

Crédit photo : Éric Messel, CC BY-SA 4.0