FAITS

Ils sont classiques. Une banque. Une société. Un emprunt. Une caution. Une procédure collective. Une assignation. Et la caution qui reproche la condamnation de la cour d’appel de Paris en date du 16 janvier 2021 au motif que la signature doit précéder la mention manuscrite et que tel n’était pas le cas en l’espèce puisque la signature était celle de l’emprunteur, même s’il s’agissait de la même personne.

Le pourvoi était déposé sur cet argument.

POSITION DE LA COUR DE CASSATION


« Vu l'article L. 341-2 du code de la consommation, dans sa rédaction antérieure à celle issue de l'ordonnance du 14 mars 2016 :
Il résulte de ce texte que les mentions manuscrites émanant de la caution, prescrites à peine de nullité de son engagement, doivent précéder sa signature.
Pour écarter les conclusions de Mme [N], qui faisait valoir que la mention manuscrite n'était pas conforme aux exigences légales, et la condamner à paiement, l'arrêt, après avoir relevé que la mention manuscrite de l'article L. 341-2, devenu L. 331-1, du code de la consommation était correctement reportée dans l'acte et qu'elle précédait le paraphe de Mme [N], défini par le dictionnaire [I] comme une signature abrégée, retient que le texte précité se borne à exiger que la signature figure sous la mention manuscrite sans imposer qu'elle lui fasse immédiatement suite, étant encore observé que la distance entre mention et paraphe ne peut affecter le sens ou la portée du texte manuscrit que Mme [N] ne conteste pas avoir rédigé. Il ajoute que cette dernière ne peut pas prétendre avoir apposé son paraphe comme représentant légal de l'emprunteur alors que la page 12 de l'acte, en cause, était réservée à son engagement de caution.
En statuant ainsi, après avoir constaté que sur la dernière page de l'acte de prêt figurait, au-dessus des mentions manuscrites légales, la mention de l'emprunteur, représenté par Mme [N], suivie de sa signature et, au bas de cette page, son paraphe, la cour d'appel, qui a retenu la validité du cautionnement en l'absence de signature de la caution sous les mentions manuscrites, a violé le texte susvisé.»

MISE EN PERSPECTIVE DE LA DECISION

Pour le commentateur de la revue la censure s’imposait. Il est vrai que la signature ès-qualités de caution manquait et que celle ci contestait avoir écrit de sa main les mentions manuscrites. Cela faisait beaucoup.

La question de l’emplacement de la signature avait fait l’objet d’un contentieux devant la Cour de cassation : Cassation chambre commerciale 17 septembre 2013 – 12-13577. Le seul paraphe ne pouvait suppléer la signature.

Ce contentieux nous en rappelle un autre sur l’apposition de la signature sur la lettre de change : est-elle celle du tireur ou de l’avaliste ? Cassation commerciale 9 février 2016 – 14-10846 et Cassation commerciale 17 Mai 2017 – 15-26495.

Par contre le formalisme de l’aval n’est pas celui de la caution et la Cour de cassation l’a jugé : Cassation commerciale 5 juin 2012 – 11-19627 et a même refusé une QPC sur cette question : Cassation commerciale 7 Mars 2019 – 18-40047.

La réforme du droit des suretés qui expurge la mention manuscrite de l’engagement de caution va donner lieu à un contentieux abondant chaque créancier professionnel imposant sa formule qui pourra être « tapuscrite ».

Loïc Belleil, directeur de la recherche juridique de Case Law Analytics

Source : Cass. Com. 8 septembre 2021, pourvoi n°19-16012, L’essentiel du droit bancaire n°10, novembre 2021, page 4.