FAITS

Selon l'arrêt attaqué (Paris, 3 août 2018), suivant offre acceptée le 30 novembre 2011, la société Crédit du Nord (la banque) a consenti un prêt immobilier à M. O... et à Mme N... (les emprunteurs). Les conditions générales du contrat prévoyaient à l'article 9-1 une exigibilité du prêt par anticipation, sans que le prêteur ait à remplir une formalité judiciaire quelconque, en cas de fourniture de renseignements inexacts sur la situation de l'emprunteur, dès lors que ces renseignements étaient nécessaires à la prise de décision du prêteur.
Soutenant que les emprunteurs avaient produit de faux relevés de compte à l'appui de leur demande de financement, la banque s'est prévalue de l'article 9.1 des conditions générales du contrat pour prononcer la déchéance du terme, puis les a assignés en paiement.

Les emprunteurs ont été déboutés par la cour d’appel et se sont pourvus en cassation.

POSITION DE LA COUR DE CASSATION

« L'arrêt relève que la stipulation critiquée limite la faculté de prononcer l'exigibilité anticipée du prêt aux seuls cas de fourniture de renseignements inexacts portant sur des éléments déterminants du consentement du prêteur dans l'octroi du prêt et ne prive en rien l'emprunteur de recourir à un juge pour contester l'application de la clause à son égard. Il ajoute qu'elle sanctionne la méconnaissance de l'obligation de contracter de bonne foi au moment de la souscription du prêt.
De ces constatations et énonciations, la cour d'appel, qui a implicitement mais nécessairement retenu que la résiliation prononcée ne dérogeait pas aux règles de droit commun et que l'emprunteur pouvait remédier à ses effets en recourant au juge, a déduit, à bon droit, que, nonobstant son application en l'absence de préavis et de défaillance dans le remboursement du prêt, la clause litigieuse, dépourvue d'ambiguïté et donnant au prêteur la possibilité, sous certaines conditions, de résilier le contrat non souscrit de bonne foi, ne créait pas, au détriment du consommateur, un déséquilibre significatif entre les droits et obligations des parties. »

MISE EN PERSPECTIVE DE LA DECISION

La phrase ainsi rédigée « sans qu'elle ait à remplir une formalité judiciaire quelconque, sauf accord écrit de sa part », pouvait selon le moyen du pourvoi laisser croire que le recours au juge n’était pas ouvert et que la clause était ambiguë. La haute cour ne suit pas cette analyse et confirme la décision des premiers juges.

Le commentateur approuve la décision en rappelant que le droit consumériste ne dispense pas l’emprunteur de son obligation de contracter de bonne foi.

Cette question fait partie de l’office du juge : cassation civile 1. 10 octobre 2010 – 17-20441 – pour une condamnation voir cassation civile 1. 27 novembre 2008 – 07-15226 – le caractère principal ou accessoire de l’obligation est indifférent : cassation civile 1. 3 mai 2006 – 04-16698 –

Je pense que nous n’en n’avons pas terminé avec ce contentieux de la clause d’exigibilité anticipée…

Loïc Belleil, directeur de la recherche juridique Chez Case Law Analytics

Source : CASSATION PREMIERE CHAMBRE CIVILE, 20 JANVIER 2021, POURVOI N-18-24297, PUBLIE AU BULLETIN, L'essentiel du droit bancaire N° 3 MARS 2021 PAGE 1