FAITS

Une société cliente de la banque DELUBAC l’assigne en responsabilité pour avoir exécuté des opérations de virement qu’elle contestait.
La cour d’appel de Paris en date du 5 février 2020 confirme la décision des premiers juges qui avaient opéré un partage de responsabilité (50/50) entre banque et client.
La banque se pourvoit en cassation au motif que l’opération de virement avait été correctement autorisée par le client.

POSITION DE LA COUR DE CASSATION

« Selon les articles L. 133-6 et L. 133-7 du code monétaire et financier, une opération de paiement est autorisée si le payeur a donné son consentement à son exécution, ce consentement étant donné sous la forme convenue entre le payeur et son prestataire de services de paiement.

En premier lieu, l'article 2A du contrat de mise à disposition via Internet des fonctionnalités du progiciel de communication bancaire « DELUBAC EDI monobanque », signé par les parties le 3 février 2015, prévoit que l'envoi des remises d'ordres de virement se fait « par télétransmission automatique sur le serveur de la banque avec utilisation du client de la carte paramètre saisie par celle-ci, / envoi en parallèle d'une télécopie de confirmation signée par
le client de la banque ».

C'est sans dénaturer cette stipulation que la cour d'appel a retenu que la saisie et la transmission d'ordres de virement par l'intermédiaire du progiciel de la banque, au moyen de l'identifiant et du code secret fournis à la société, ne suffisaient pas à établir le consentement de cette dernière, lequel devait également être donné par l'envoi, concomitamment à cette transmission, d'une télécopie portant la signature d'une personne habilitée, en l'occurrence l'un des dirigeants de la société.

En second lieu, contrairement à ce que soutient le moyen dans sa première branche, dès lors que la cour d'appel a retenu, par des motifs vainement critiqués par la deuxième branche, que le consentement à un ordre de virement devait être établi, notamment, par l'envoi d'une télécopie de confirmation, la seule preuve de la passation de cet ordre par l'intermédiaire du progiciel de la banque avec l'utilisation des identifiant et code adéquats par la comptable de la société, à laquelle ils avaient été confiés, n'établissait pas que l'opération de paiement avait été autorisée. Le moyen n'est donc pas fondé. »

MISE EN PERSPECTIVE DE LA DECISION

La question dans le débat consistait à savoir si le consentement donné par le client était conforme aux dispositions contractuelles.

En sus de l’utilisation du logiciel mis à disposition par la banque le client devait confirmer son ordre par télécopie ce qui n’a pas été fait. Les juges du fond se sont donc fondés sur cette erreur de la banque pour la condamner mais également sur celle du client qu’ils ont estimé participer à la réalisation du préjudice.
Les juges de cassation n’ont pas visé l’article 1937 du code civil pourtant souvent à l’origine de la responsabilité de la banque : Cassation commerciale 08/02/2010 – 09-12853 ;
13/04/2013 – 12-18119 ; 10/03/2015 – 14-11045 – pour une responsabilité entière du client voir Cassation commerciale 24/01/2018 – 16-22336-
C’est selon toute vraisemblance parce que les articles L 133-6 et L 133-7 du code monétaire et financier suffisent sans qu’il soit besoin de se référer à cette disposition du code civil qui concerne le dépôt.

Loïc Belleil, directeur de la recherche juridique de Case Law Analytics.

Source: Cass. Chambre Commerciale, 21 avril 2022. Pourvoi n° 20-18859