La reconnaissance de dette qui interrompt la prescription peut se situer dans un document qui n'est pas adressé au créancier s'il est l'aveu non équivoque du débiteur (Cass. Civ.1ère 2 décembre 2020, pourvoi n°19-15813).

FAITS

Deux époux sont mariés sous le régime de la séparation des biens et font l’acquisition en indivision d’un appartement au moyen de fonds propres et d’emprunts. Ils se séparent et une ordonnance désigne un notaire pour élaborer un projet de liquidation du régime et de partage. Par la suite un jugement prononce le divorce et ordonne la liquidation et le partage de leurs intérêts patrimoniaux. L’ex époux fait grief à l’arrêt d’avoir rejeter sa demande tendant à ce que soit inscrite au passif indivis la dette résultant du prêt consenti par le père de l’ex épouse aux emprunteurs afin de payer les frais d’acquisition du bien indivis alors selon lui que le délai de prescription avait été interrompu par une reconnaissance de dette.

La cour d’appel de Paris le 19 décembre 2018 a débouté l’ex époux estimant que la reconnaissance de dette adressée au notaire par son ex épouse dans un dire adressé au notaire n’a pas interrompu le délai de prescription.

Il se pourvoit en cassation sur différents moyens dont seul celui portant sur la prescription retiendra notre attention. M. prétendait que le document remis au notaire était révélateur d’un aveu des obligations peu important qu’il émane de son ex épouse et non de lui.

POSITION DE LA COUR DE CASSATION

« Vu l'article 2240 du code civil : Aux termes de ce texte, la reconnaissance par le débiteur du droit de celui contre lequel il prescrivait interrompt le délai de prescription. Pour rejeter la demande de M. E... tendant à ce que soit inscrite au passif indivis la dette résultant du prêt consenti par son père aux époux afin de payer les frais d'acquisition du bien indivis, l'arrêt retient qu'il ne peut être considéré que la prescription acquise a été interrompue par la reconnaissance de cette dette par Mme C... dans un dire adressé au notaire, le dire n'ayant d'effet qu'entre les parties. En statuant ainsi, alors qu'interrompt la prescription la reconnaissance du droit du créancier figurant dans un document qui ne lui est pas adressé s'il contient l'aveu non équivoque par le débiteur de l'absence de paiement, la cour d'appel a violé le texte susvisé »

MISE EN PERSPECTIVE DE LA DECISION

Cette décision fait l’objet d’une publication au bulletin et c’est justice. La Cour de cassation vise l’article 2240 du code civil qui dispose «  La reconnaissance par le débiteur du droit de celui contre lequel il prescrivait interrompt le délai de prescription ».

Peu importe que le document ne lui soit pas adressé. La nouveauté de la décision tient à cette précision et légitime sa publication. Par contre la reconnaissance doit émaner du débiteur ou de son mandataire : Cassation civile 1. 4 mai 2012 – 11-15617.

La reconnaissance doit être univoque : Pour un paiement voir Cassation civile 1. 25 janvier 2017 – 15-25759 –  et explicite Cassation civile 1. 11 mai 2017 – 16-12811 – Commerciale 12 juillet 2005 – 04-10214. Elle peut être partielle Cassation civile 1. 25 février 2016 – 15-15994 – Nous savons désormais qu’elle peut se situer dans un rapport contractuel distinct.

Loïc Belleil, directeur de la recherche juridique chez Case Law Analytics

Source : Cass. Civ.1ère 2 décembre 2020, pourvoi n°19-15813, bulletin d’actualités des greffiers n°150, mars 2021, p. 11

Crédit photo : Photo by Thomas Bormans on Unsplash